Coloration disruptive

Exemple de coloration ruptive : la dossière de la carapace de la tortue imbriquée est brun rouge à orangé avec des marbrures plus sombres, des stries et des mouchetures jaunes
Cette coloration disruptive est aussi très homochromique avec les récifs coralliens qu'elle affectionne, passant ainsi inaperçue auprès de ses prédateurs[1].
Dès le crétacé, certains dinosaures adoptent deux modes de camouflage passif : la contre-tonalité (colorations cryptiques à l'origine d'un fort contraste dorso-ventral) et les figures ruptives (au niveau de la queue)[2].
Le maquereau commun présente un triple camouflage : raies transversales formant des motifs disruptifs[3], ombre inversée et argenture[4].
Les taches disruptives qui morcellent le corps du girafon ont une fonction de camouflage, de reconnaissance de ses proches, et de thermorégulation. Cette fonction de camouflage est perdue chez les adultes[5] dont les ruades sont capables de briser les mâchoires de leurs prédateurs[6].
L'okapi a un pelage ruptif sur les pattes et l'arrière-train qui lui permettent de se confondre avec les rais de lumière vacillants à travers les feuilles des forêts équatoriales de l'Afrique centrale.
La panachure foliaire peut servir de camouflage chez les plantes de sous-bois où percent quelques rais de lumière.
Les aires pigmentées du dauphin de Commerson et ses marques distinctives (taches gulaire et génitale) contribuent à leurrer certaines de ses proies dans des conditions de faible luminosité et des eaux troubles[7].

En écologie, la coloration disruptive, appelée aussi camouflage disruptif ou plus familièrement bariolage, est une stratégie de cryptisme qui repose sur une forme de camouflage optique consistant chez des animaux essentiellement, à rompre l'unité visuelle de leur corps et de leur symétrie afin de les rendre moins perceptibles, dans un environnement déterminé, à la fois de leurs proies et de leurs prédateurs éventuels. Les figures disruptives (du latin dis, « à part » et ruptus « rompu », issu du verbe rumpere, « rompre ») ou ruptives (taches, marbrures, réticulations, zébrures, rayures) rompent la silhouette d'ensemble de l'animal et réduisent sa détectabilité. Leur efficacité est renforcée lorsqu'elles perturbent les formes corporelles (notamment les contours) ou des caractéristiques saillantes (notamment les membres ou les yeux) qui sont connues pour faciliter l'identification rapide des animaux[8],[9]. L'observateur de tels motifs perçoit ainsi « un ensemble de figures plus ou moins chaotiques qu'il a du mal à rapporter à une structure d'ensemble bien délimitée[10] ».

Ce camouflage anti-prédateur est une tromperie animale qui existe aussi chez les plantes pour se défendre contre les herbivores[11],[12].

La coloration disruptive est un mimétisme visuel qui s'ajoute souvent à la coloration cryptique. Pouvant remplir d'autres fonctions, ce bariolage s'oppose à un signal de défense contre les prédateurs, l'aposématisme.

Certaines techniques de camouflage militaire se sont bio-inspirées de ce principe.

  1. (en) Jack Rudloe, Time of the Turtle, E.P. Dutton, , p. 107.
  2. (en) Fiann M. Smithwick, Robert Nicholls, Innes C. Cuthill, Jakob Vinther, « Countershading and Stripes in the Theropod Dinosaur Sinosauropteryx Reveal Heterogeneous Habitats in the Early Cretaceous Jehol Biota », Current Biology, vol. 27, no 1,‎ , p. 3337-3343 (DOI 10.1016/j.cub.2017.09.032, lire en ligne).
  3. Ces raies alternativement claires et sombres « dessinent sur le corps du poisson les lignes d'ombre et de clarté que fait le soleil jouant sur les menues vagues courtes entretenues par la brise du large ». Cf Roger Caillois, Le mimétisme animal, Hachette, , p. 28.
  4. Changement de couleur du tégument qui devient blanc-argenté grâce au développement de guanophores riches en purines (guanine et hypoxanthine), ce qui lui permet d'agir comme un miroir orienté verticalement réfléchissant la lumière zénithale et rendant le poisson quasiment invisible en vue latérale. Cf (en) Sonke Johnsen, « Hide and seek in the open sea: pelagic camouflage and visual countermeasures », Ann Rev Mar Sci., vol. 6,‎ , p. 369-392 (DOI 10.1146/annurev-marine-010213-135018, lire en ligne)
  5. Les jeunes chez les autres méga-herbivores (nl) (éléphants, rhinocéros, hippopotames) n'ont pas ce pelage disruptif, probablement parce que les adultes défendent en groupe les petits, contrairement aux girafes adultes qui sont de plus handicapées par leur grande taille. Cf Camille Crosnier, « Pourquoi les girafes ont-elles des taches ? », sur Radio France, .
  6. (en) Derek E. Lee, Douglas R. Cavener, Monica L. Bond, « Seeing spots: quantifying mother-offspring similarity and assessing fitness consequences of coat pattern traits in a wild population of giraffes (Giraffa camelopardalis) », PeerJ, vol. 6, no e5690,‎ (DOI 10.7717/peerj.5690).
  7. (en) Deborah Nuzzolo, The Commerson's Dolphin Story, SeaWorld Inc, , p. 10.
  8. (en) James H. Elder, Ljiljana Velisavljević, « Cue dynamics underlying rapid detection of animals in natural scenes », Journal of Vision, vol. 9, no 7,‎ , p. 1-20 (DOI 10.1167/9.7.7).
  9. (en) Toby J. Lloyd-Jones, Juergen Gehrke, Jason Lauder, « Animal Recognition and Eye Movements: The Contribution of Outline Contour and Local Feature Information », Experimental Psychology, vol. 57, no 2,‎ , p. 117-125 (DOI 10.1027/1618-3169/a000015).
  10. Jean-François Bouvet, La stratégie du caméléon, Seuil, , p. 56-57.
  11. (en) Simcha Lev-Yadun, « Why do some thorny plants resemble green zebras? », Journal of Theoretical Biology, vol. 224, no 4,‎ , p. 483–489 (DOI 10.1016/s0022-5193(03)00196-6).
  12. (en) T. J. Givnish, « Leaf Mottling: Relation to Growth Form and Leaf Phenology and Possible Role as Camouflage », Functional Ecology, vol. 4, no 4,‎ , p. 463–474 (DOI 10.2307/2389314).

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